Ma lecture des Fleurs du mal de Charles Baudelaire

Les poèmes des fleurs du mal de Baudelaire m’ont accompagné au cours des journées plus ou moins ensoleillées de ce mois de septembre. Ils m’ont fait réfléchir, rire et pleurer mais laissez-moi vous raconter.

Cette lecture était pour moi avant tout une lutte contre le temps. Le délai était court et la tâche était grande. Je me savais incapable de m’improviser grand amateur de poèmes en 1 mois, alors je décidais de prendre une approche plus pragmatique en définissant un plan de lecture rigoureux et ambitieux.
Comme le décrit Baudelaire à merveille dans son poème « L’horloge », le temps est la délivrance ultime de son spleen, et ce qui fait sa force, c’est sa régularité.

Horloge ! Dieu sinistre, effrayant, impassible

L’Horloge

Impassible, cet adjectif devait décrire mon attitude face à cette lecture. Rien ne devait me déconcentrer de mon agenda. Il me fallait combattre le mal par le mal, je devais adopter ce mouvement régulier et impassible de l’horloge. Il me semblait que la moindre erreur m’accablerait, qu’elle me serait fatale.

L’obscur ennemi qui nous ronge le cœur

L’ennemi

C’est ainsi que Baudelaire décrit le temps dans son poème « L’ennemi ».
Lors de journées chargées, mornes ou pluvieuses, il était toujours là. Il faisait partie de ma routine que je savais salvatrice. En effet, le temps, lui, continuait sa route et le 9 octobre arriverait inévitablement. Il fallait continuer. Mais parfois, une détresse m’envahissait ; celle de l’incompréhension, qui me conduisit plus d’une fois dans le Spleen.


Tel Baudelaire face à la nature, j’essayais d’aller plus loin et de dépasser la forme et l’esthétique de ses poèmes pour y trouver un sens plus profond.

La nature est un temple où de vivants piliers,
Laissent parfois sortir de confuses paroles.

Correspondances

J’essayais d’analyser, de comprendre et de transcender ses mots. À la manière de la philosophie symboliste de Baudelaire, je n’arrivais pas à me satisfaire d’une simple lecture. Il me fallait plus, je devais comprendre les sens cachés et lire ce que d’autres lecteurs avide de partage en avaient pensé.
Mais il faut aussi savoir s’avouer vaincu, vaincu par la complexité du poème. Il y a des textes qui sont simplement hors de notre portée, et il faut réussir à l’accepter.

J’ai plus de souvenirs que si j’avais mille ans.

Spleen(2)

Mais le plus grand défi, devant celui de la compréhension et du temps, était celui de la mémoire. Les souvenirs s’effacent et les mots s’emmêlent. Je voulais être une éponge et m’imprégner de ses paroles, mais je n’étais guère plus qu’une vulgaire surface imperméable sur laquelle tout glissait, tout m’échappait.
Alors est venu à plusieurs reprises un sentiment d’inutilité.

J’ai eu l’imprudence de lire ce matin quelques feuilles publiques ; soudain, une indolence, du poids de vingt atmosphères, s’est abattue sur moi, et je me suis arrêté devant l’épouvantable inutilité d’expliquer quoi que ce soit à qui que ce soit. Ceux qui savent me devinent, et pour ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas comprendre, j’amoncellerais sans fruit les explications.

Projet de préface des Fleurs du mal (1868)

C’est en ça que son projet de préface m’a particulièrement parlé. Je me sentais désormais incapable et indigne.
Si même Baudelaire qualifiait son recueil d’« essentiellement inutile », et que je n’étais pas capable de comprendre son sens, alors à quoi bon…


Mais parfois, sans rien chercher à analyser, on se retrouve frappé par une innocente beauté. Une œuvre nous parle et nous transporte loin.

Emporte-moi wagon ! Enlève-moi, frégate !
Loin ! Loin ! Ici la boue est faite de nos pleurs !

Moesta et Errabunda

Elle peut nous toucher par sa beauté, avec par exemple « Réversibilté« . Poème dans lequel il décrit la beauté pure et parfaite de la femme aimée.

Ange plein de bonheur de joie et de lumières

Réversibilité

Sa lecture résonne en nous et nous laisse seul et impuissant.
Mais je me suis aussi parfois retrouvé touché dans une dimension personnelle et intime. Le poème « Paysage » m’a transporté dans mes souvenirs d’une vie parisienne passée. Un épisode de quelques mois au dernier étage d’un immeuble au pied de Montmartre. Je me sentais alors si près de sa description ; ouvrant la fenêtre et contemplant la volupté d’un coucher de soleil sur les toits surchauffés.

Et les grands ciels qui font rêver d’éternité

Paysage

Cette époque, pourtant lointaine, m’a semblé proche et intime lors de la lecture de ce poème. En ce sens, je me suis reconnu dans la démarche du poète lorsqu’il écrivait « Moesta et Errabunda ». Revivre un moment de paradis est impossible, mais on peut s’adonner à retrouver sa saveur par le souvenir. Et Baudelaire m’a aidé à y parvenir.


Durant la lecture, j’ai moi aussi cheminé entre Spleen et Idéal. Au gré de la météo et de mes pensées, j’ai traversé la mélancolie, le désemparement, voire même le découragement. Mais ce recueil m’a aussi transporté vers un paradis, un éblouissement et un émerveillement.
J’ai l’impression de m’être rapproché du poète et de mieux saisir ses paroles.
Pour conclure, je dirais que ce mois m’a appris à apprécier cette œuvre dans sa beauté, comme dans sa complexité.

Liste décroissante de mes poèmes préférés (à l’instant t, donc pas pour l’éternité) :

  1. Paysage
  2. L’horloge
  3. Chant d’automne
  4. Spleen 2
  5. Réversibilité
  6. Correspondances
  7. L’Ennemi
  8. Parfum exotique
  9. Les Bijoux
  10. L’invitation au voyage

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J’espère que vous avez apprécié mon compte-rendu des “Fleurs du mal” de Charles Baudelaire, n’hésitez pas à prendre des notes de ce contenu dans votre second cerveau 🙂

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