Manifeste · · 5 min de lecture

5 - La coopération

5 - La coopération

Nous venons donc de discuter au niveau micro des solutions qu'on pouvait mettre en place pour permettre de passer d'un système marketing qui est push à un système marketing qui est plutôt pull et plus vertueux pour tout le monde. Maintenant, dézoomons un peu et revenons à un niveau macro.

Au début de cet article, je vous expliquais comment l'unité atomique de production était devenue l'individu. J'aimerais repartir de ce point de départ pour aller plus loin. J'aimerais aller plus loin en vous parlant de comment va se passer la collaboration dans l'économie de la création.

Jusqu'à présent, quand on voulait collaborer avec une équipe, on se mettait une architecture rigide. C'est-à-dire que, moi, Eliott, j'ai ma boîte Atomic et quand je veux collaborer avec quelqu'un, je lui dis "tiens, est-ce que tu veux devenir mon employé ?" Si oui, je le rémunère mettons 5 000 euros par mois, il devient alors une charge fixe et il peut alors se permettre de se reposer parce que c'est moi qui le paie, c'est moi qui prends la responsabilité de payer son salaire. Alors on peut collaborer ensemble et on peut construire des produits qui vont m'enrichir moi et mon entreprise.

Mais il y a plusieurs gros problèmes avec ce mode de fonctionnement avec les entreprises. Le plus gros problème, c'est que les entreprises ne sont pas agiles. Elles vont avoir une mission, des charges fixes, une direction, et puis elles vont y aller. Ensuite, sous cette vision vont se cacher beaucoup d'individualités. Les individualités qui auraient pu chacune avoir leur propre petit monde digital, leur propre unicité, leurs propres concepts, etc. Mais non, tout le monde va un peu se restreindre. Restreindre ses compétences, restreindre sa créativité pour se conformer à la vision d'une entreprise. Donc, on est tous en train de travailler pour une grosse vision sans montrer notre individualité et nos talents.

Ensuite, le problème des entreprises, c'est qu'on a beaucoup de personnes sous-performantes. Parce que quand on est tout seul dans un marché où le travail devient super liquide, où l'unité atomique de production devient la personne et non plus l'entreprise, si moi, je suis une unité de travail autonome et que je suis sous-performante, personne ne va m'embaucher. Je vais finir à la rue. Alors que si j'arrive à être embauché dans une entreprise, je peux me permettre d'être sous-performant, et puis il n'y aura aucun problème, l'entreprise va me garder très longtemps, parce que j'aurai un bon statut et je serai protégé. C'est ce que Nassim Taleb décrivait dans son livre Skin in the Game. Donc les entreprises sont naturellement sous-efficientes, parce qu'elles permettent aux gens d'être sous-efficients. Par contre, si on vient dans une économie de la coopération, où les gens ne sont plus dans des structures rigides, mais coopèrent entre eux de manière fluide pour des projets, alors là, une personne qui est non compétente va simplement être éjectée.

Donc ce que moi je prône plutôt aujourd'hui, c'est un modèle pour les créateurs comme ce qui suit.

Le modèle de collaboration fluide

Il n'y a pas un créateur qui cherche à faire une grosse entreprise comme une maison d'édition, un service de publication ou un journal par exemple. Personne ne cherche à faire un gros truc et ensuite à mettre tout le monde sous sa même image et sous sa même vision. Non ! On a plein de créateurs qui ont tous leur propre unicité et leur propre petit monde. Eliott Meunier a son monde, il a ses super fans, il a ses idées. Les gens avec qui je vais collaborer de même, ils ont tous leur petit monde, leurs propres idées, leurs propres méthodes, leurs propres livres et ils vivent de ça.

Quand on veut se rejoindre pour un projet, il faut que ça soit le plus fluide possible. Il faut que nos deux unités puissent se retrouver pour un moment donné avec nos talents précis. On est alors dans une alliance souple qui se réunit sous peut-être une marque ou un produit mais on reste une unité sans charges qui n'internalise pas les talents. On collabore avec d'autres créateurs et freelance sur les compétences qui nous manquent, sans créer de boîte ou de structure.

Mon rêve ce serait qu'on puisse faire des boîtes, des entreprises, des statuts fiscaux qui soient temporaires. Que je puisse créer une structure pour trois mois par exemple, le temps de collecter tous les paiements pour une collaboration donnée et puis que juste après, le système nous redistribue à ma boîte et à celle de mon ami la part du revenu qui nous revient après un calcul qui est basé sur un contrat sur lequel on s'était mis d'accord au départ. Des sortes de boîtes temporaires qui permettraient des associations fluides (c'est d'ailleurs le principe des smart contracts sur la blockchain aujourd'hui ;))

Parce qu'aujourd'hui, si je veux faire une association avec un ami, on doit créer une boîte ! Donc 600 euros pour la créer, 1000 euros pour la liquider et toujours des discussions incessantes sur combien de parts, pour qui, sous quelle marque, etc. ce n'est pas fluide pour collaborer sur un projet. Dans un monde idéal, il faudrait que chacun puisse avoir sa boîte personnelle et qu'on puisse trouver des formats de collaboration et non pas de société qui soient fluides pour que tout le monde puisse collaborer correctement dans la Creator Economy.

Donc, par exemple, pour créer une formation sur la musique, quand j'avais encore Atomic, j'aurais trouvé un formateur et je lui aurais dit "Tiens, on va créer la formation Atomic Music. Mais les conditions sont les suivantes : on va la mettre sous ma marque et ensuite je vais internaliser moi-même l'équipe, les charges de marketing, la méthode, la production du truc, etc. Cependant, les profits qu'on fait avec ce produit, ce sera pour moi. Et puis toi, tu deviens une sorte de salarié de ma boîte." Aujourd'hui, je ferais un truc complètement différent qui est simplement "Eh, est-ce que tu veux faire une alliance entre ma marque personnelle et ta marque personnelle pour créer un projet plus grand qui nous fait kiffer. On va là où va l'énergie et là où ça nous guide."

C'est pour cette raison là que j'ai fait évoluer ma boîte Atomic. Atomic, c'était un truc qui essayait de tout centraliser. On avait 14 formations avec des formateurs différents. Tout était remis sous la même enseigne. J'avais internalisé l'équipe, les frameworks, etc. pour d'autres formateurs ou d'autres créateurs. J'avais aussi des programmes que je faisais en collaboration. Chaque fois c'était Atomic qui devait se porter responsable et garant du cash flow des projets. C'était un modèle d'entreprise qui était rigide.

Moi, je n'ai plus du tout envie de ça. J'ai envie que tout le monde, et moi y compris, puisse revenir à son unité atomique de production. Que chacun puisse à son essence : quels sont les concepts qu'il développe, quelles sont les idées qu'il met en avant, quelles sont les méthodes qu'il crée, c'est quoi son unicité, c'est quoi l'art qu'il met au monde pour que chacun puisse se reconnecter sur ce qu'il veut vraiment faire.

Une fois que chacun a son propre blog, son propre monde en ligne, on peut se demander comment est-ce qu'on fait pour collaborer ? Et alors, on peut se retrouver pour des collaborations fluides. Par exemple avec Jean-Charles Kurdali, avec lequel on fait un programme qui s'appelle Perspectives, une école nouvelle génération pour devenir expert de son domaine et créer sa propre méthode. Et puis une autre collaboration fluide avec Charly Aubert, qui reprend l'image Atomic sous laquelle on va créer une collaboration fluide dans un incubateur pour les porteurs de projets passionnés. Tout le monde a sa marque personnelle, son acquisition, son média. Les idées restent dans nos marques personnelles, par contre on se rejoint pour créer des projets qui nous font kiffer et qui aident les gens ensemble.

Le partage de revenus pource genre de projets devient alors aussi beaucoup plus juste et inspirant : sur un produit à 1000€ par exemple, on va se partager la marge nette comme suit : 30% vont à la personne qui a ramenée la vente et 35% vont à chaque créateur indépendant.

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